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Découverte des métiers de la mer : embarquez dans le sillage d’un bolincheur

07|07|2023
Chronique de la mer
Lecture : 5 minutes

Connaissez-vous la bolinche cette technique de pêche durable, traditionnelle sur nos côtes bretonnes ? Ce mois-ci, SoPhare est allé à la rencontre d’Yvan Le Lay, patron pêcheur et bolincheur passionné, qui nous raconte sa journée à bord du Stereden ar Moor.

Yvan, marin-pêcheur de père en fils

Yvan Le Lay, capitaine du Stereden Ar Moor

Je navigue depuis mes 17 ans. J’ai appris le métier de marin-pêcheur aux côtés de mon père, avant de reprendre l’affaire. Mon bateau se nomme Stereden Ar Moor, ce qui signifie étoile de mer en breton. C’est un navire en bois de 15,60 m, avec 7 membres d’équipage à bord. Nous pêchons exclusivement à la bolinche, dite aussi « petite senne » ou « senne coulissante ». C’est une technique de pêche artisanale, de proximité et peu profonde (entre 10 et 15 m) utilisée pour la capture des espèces pélagiques, notamment les poissons bleus comme la sardine, le maquereau, le hareng, l’anchois ou le chinchard…. Notre port d’attache est Saint Guénolé dans le Finistère. Notre secteur de pêche à la sardine – notre activité principale -, s’étend du Sud de Molène jusqu’à l’archipel des Glénans, à environ 3 milles nautiques de la côte.

Une journée de pêche à bord du Stereden

Entre 18 h et 21 h : départ du port. Le bateau part toujours en fin de journée, car c’est au coucher du soleil que les sardines remontent vers la surface. Or, idéalement avec nos engins de pêche à la bolinche, le poisson doit se situer à 10-15m de profondeur.

21 h – 5 h : pêche de nuit. Plongés dans le noir, nous cherchons les bancs de poisson grâce à un sonar situé sous la coque du bateau, qui permet de visualiser les bancs sur un écran d’ordinateur. Dès qu’on voit une tâche, on lance le filet, on en fait le tour pour encercler le poisson. Puis on coulisse le fond du filet, qui forme alors une demi-sphère contenant le banc. L’opération complète (encerclement et boursage) dure environ 25 mn. Le poisson est chargé vivant à bord du bateau à l’aide d’une sorte de grande épuisette, la salabarde, et stocké dans de grandes cuves réfrigérées. Puis nous répétons l’opération jusqu’au petit matin. En une nuit, nous pouvons ramener 16 à 17 tonnes de sardines au maximum. Nous veillons à ne pas trop tasser le poisson, pour garantir aux pêcheries, aux conserveries et aux mareyeurs une qualité irréprochable.

5 h- 7h : retour au port et débarquement du poisson. Au lever du jour, le poisson, sensible à la luminosité, redescend au fond de la mer : il est temps pour nous de rentrer. Nous faisons route vers la côte pour vendre la pêche du jour à la criée de Saint Guénolé.  En milieu de matinée, retour à la maison pour un repos bien mérité !

Une pêche respectueuse de la ressource et des hommes

La bolinche est une pêche locale et durable par excellence : le banc capturé n’est pas celui recherché ? Le poisson ne fait pas la taille minimale requise, le filet contient trop de juvéniles ou de prises accessoires ? Alors nous rouvrons la senne et le poisson s’échappe. Contrairement à d’autres techniques, comme le chalut ou la pêche à la ligne, le poisson s’en sort vivant et sans blessure. Quand il nous arrive de capturer des bars, nous respectons scrupuleusement la licence, qui limite les prises à 42 tonnes sur l’année, cela reste très marginal. Nous sommes sur une petite pêche côtière, qui par nature, respecte la ressource halieutique et les fonds marins.

L’autre gros avantage de la bolinche, c’est qu’elle préserve la qualité de vie des marins-pêcheurs. La pêche est une profession réputée physique et dangereuse. Mais c’est beaucoup moins vrai qu’autrefois. Les anciens relevaient les filets à la main, de nos jours, les filets sont plus performants, les tire-filets et l’électronique embarquée sont là pour nous aider. Certes, nous travaillons de nuit, pour des sorties en mer de plus de 12 heures, mais la bolinche étant une pêche locale, nous rentrons chez nous tous les jours. Nous ne sortons pas le week-end, ni en cas de tempête, la vie de famille est ainsi préservée. Et puis, nous avons un cadre de travail incomparable, avec la mer pour seul horizon, on se sent libres. Pour ma part, je ne changerais de métier pour rien au monde. C’est une passion, une évidence, ce qui fait que je ne le ressens pas du tout comme une profession particulièrement difficile ou risquée.

Envie d’en savoir plus sur les engagements de pêche responsable utilisées par les pêcheurs partenaires de Phare d’Eckmühl ? Rendez-vous sur notre site Internet dans la rubrique « Les espèces ».